Rue Maghin 95, à Liège
Du mardi au samedi
de 10h à 18h

Accueil > Coups de coeur > Nastassja Martin "A l’est des rêves" paru en 2022 aux Empêcheurs de penser (...)

Nastassja Martin "A l’est des rêves" paru en 2022 aux Empêcheurs de penser en rond

Nastassja Martin est anthropologue ; elle a été élève de Philippe Descola. Après les Âmes sauvages et Croire aux fauves, elle publie son troisième livre, À l’Est des rêves.
Ses travaux ont à voir avec les peuples (et les espèces non-humaines avec qui ils échangent) situés de part et d’autre du détroit de Béring. Les Gwinch’in du grand nord de l’Alaska et les Even du Kamtchatka. Deux peuples confrontés au régime colonial - occidental pour les premiers et russe pour les seconds. Deux peuples aux avant-postes des mutations écologiques radicales, conséquences de notre époque.
Dans À l’Est des rêves, Nastassja Martin s’approche des Even dans le but de comprendre comment une famille de ces anciens nomades gardiens de rennes, sédentarisés et dépossédés de leur troupeau par le régime soviétique, a regagné la forêt d’Icha. Durant 7 ans, elle vivra par intermittence avec Daria et sa famille, à Tvaïan, un ancien Kolkhoze ayant fait faillite, situé à 400 km de toute route.
Ses écrits rigoureux travaillent à des formes nouvelles de l’essai scientifique. Ses recherches, clairement circoncises au champ de l’anthropologie, ne cessent de mettre en lumière son engagement politique, sa conscience aigüe des bouleversements de notre époque, son respect pour le vivant et son chemin littéraire.
Sa langue, méthodique, pragmatique, saisissante et délicate avance en terrains à priori disjoints : la géopolitique, l’histoire coloniale, les pratiques animistes, les récits collectifs, l’usage des rêves, les mythes, la pêche, les débordements climatiques.
À l’Est des rêves est un livre dense, intense, dans lequel je me suis senti en confiance. Un livre dans lequel les enjeux contemporains m’ont semblé comme raconté dans un léger futur, avec des pistes à suivre, des constats à faire, des histoires à renouer. Quasiment chaque soir de lecture, je l’ai déposé à côté de moi, dans un demi-sommeil, pour le laisser agir encore pendant la nuit.
Un livre-rêve en somme.
Une chronique de Pierre-Nicolas Bourcier

Portfolio